lundi 20 avril 2015

La bataille de Sarin

Quel enjeu?

La bataille de Sarin a déjà commencé. La semaine dernière avec la prise de la cimenterie Lafarge, les YPG/YPJ/FSA ont verrouillé leur flanc EST. Entre l'Euphrate et la cimenterie ils contrôleraient 99% de cette portion de la route M4.

La carte du front le 17/04/2015 (en fonction des infos disponibles à ce moment)


Le relief joue ici un rôle capital, les forces kurdes contrôlent les hauteurs à l'OUEST de Sarin sur l'Euphrate. L'état islamique (EI) tente de renforcer Sarin par le sud, car Sarin est la seule voie d'accès au SUD-OUEST du canton de Kobané et à cette portion de la route M4.

Le front, si Sarin tombe aux mains des forces kurdes, devrait ressembler à ceci :


Les forces kurdes tenant les hauteurs au SUD-EST de Sarin fermeraient définitivement l'accès au SUD du canton de Kobani à l'EI  (ligne rouge). Ce front serait beaucoup plus facile à tenir pour les YPG, ils domineraient complètement (au sens strict) le terrain.

Et après?

Une fois verrouillé l'EI au SUD-EST, les YPG ont plusieurs options :
  1. Lancer une offensive sur Raqqa (la capitale auto-proclamée de l'EI) au SUD-EST du canton. Mais les kurdes ne sont pas idiots, ce serait beaucoup trop dangereux de laisser des troupes de l'EI au NORD sur leurs arrières (Giré Spi Tal Abyad).
  2. Lancer une offensive à l'OUEST, en direction de Giré Spi (Tal Abyad) justement afin de mettre fin au support évident de l'EI par la Turquie, et ensuite faire la jonction avec le governorat d'Hassaké. Cette jonction permettrait aux YPG de recevoir une aide directe du Kurdistan iraquien, et peut-être obtenir des armes lourdes et des renforts échappant au contrôle de la Turquie.
  3. Franchir l'Euphrate.
Il va donc être très instructif de voir non seulement comment va se dérouler cette bataille, mais aussi la stratégie dans les semaines qui suivront. (notez que je penche fortement pour le plan 2). 

Attention! L'EI a peut-être décidé de faire de cette bataille une revanche à leur défaite lors du siège de Kobané, mais cela me semble 'géographiquement' improbable.


dimanche 12 avril 2015

Le Rojava et les Yézidis

Les monts Sinjar sont principalement peuplés par des Yézidis qui les vénèrent et les considèrent comme l'endroit le plus haut où l'arche de Noé s'est installée après le Déluge biblique. (wikipedia)


Fig. 1

En août 2014, environ 40 000 Yazidis attaqués par l'État islamique autour de la ville de Sinjâr se réfugient dans ces montagnes. Depuis, les YPG (syriens) aidés des peshmergas (irakiens) contrôlent ses monts et DAESH perd lentement du terrain dans cette région.


À terme, les Yézidis demandent sinon leur indépendance, du moins une véritable autonomie. Considérés comme étant d'origine kurde, la majeure partie des Yézidis sont administrativement iraquiens, mais une fois DAESH repoussé les kurdes d'Iraq qui abritent beaucoup de réfugiés Yézidis vont certainement demander le rattachement administratif de cette région au Kurdistan.

Mais voilà, les Yézidis s'étant sentis trahis par les peshmergas (lors de l'offensive de DAESH, les peshmerghas du Sinjar se sont repliés sur Kirkourk pour empêcher qu'il tombe alors même que les troupes de l'armée irakienne fuyaient la ville) n'envisagent pas une telle solution.

Durant le siège des Monts Sinjar, les YPG/YPJ (PKK) Syriens ont commencé à former des groupes d'auto-défense (mixtes!) et participent quotidiennement aux combats contre DAESH. On peut dès lors se poser la question suivante : l'avenir des Yézidis ne serait-il pas mieux assuré par une intégration au Rojava (Kurdistan de l'ouest) ?


Lire:


La figure.1 permet de situer les monts Sinjar et la figure.2 montre le relief détaillé de cette région. La frontière syrienne est en rouge.

Monts Sinjar
Fig. 2
Géographiquement, le Sinjar a plus d'affinités avec le Rojava qu'avec le Kurdistan irakien duquel il est séparé par des zones d'influence à dominante arabe. Dans tous les cas l'indépendance totale des Yézidis parait impossible, et donc un choix démocratique devra être fait par les Yézidis eux-mêmes qui déterminera le monde dans lequel ils veulent vivre en paix, car n'en doutons pas, tout choix imposé, que ce soit par les kurdes ou par l'Irak sera irrémédiablement source de tensions et prémisse à de futurs conflits voire génocides.